lundi 2 avril 2007

CORSE-MATIN 10 janvier 2000

La SNCM et la procédure d'appel d'offres

Maurice Perrin (CGC) : " Depuis l'aérien

le débat a changé de nature "

Élu du personnel de la SNCM dont il est membre depuis vingt ans - à la tête aujourd'hui des services informatiques - secrétaire général de l'encadrement CFE-CGC (la deuxième force syndicale avec le STC), Maurice Perrin s'investit beaucoup dans le dossier du prochain appel d'offres maritime, oeuvrant à la fois pour renforcer la cohésion syndicale, être à l'écoute de l'opinion insulaire et favoriser la concertation collégiale avec les élus corses. L'occasion pour Corse-Matin de prendre le pouls dans les rangs des salariés de la compagnie nationale...

JMR Vous avez récemment rencontré Jean Baggioni et le président de l'office des transports...

MP Le scénario de l'avenir est encore assez flou pour la dévolution du marché maritime. La concertation s'était amorcée avec la présidence de l'assemblée de Corse. L'ouverture se fait avec l'exécutif et nous espérons rencontrer tous les présidents de groupe. A travers cette première rencontre, on a senti que le conflit aérien pesait encore beaucoup sur les esprits...

JMR Vous espérez que la procédure d'appel d'offres sera elle aussi annulée ?

MP Je ne pense pas que cette porte de sortie existe pour le maritime. Nous attendons le mois de mars et la définition par l'assemblée de Corse des obligations de service public. La réalité, c'est que la réglementation européenne n'est pas très cohérente et, abstraction faite de toutes les circonvolutions politiques qui sont d'usage, on adhère au souci de Jean Baggioni de passer, avec le soutien de l'État, par une phase de clarification des règlements en y intégrant la dimension sociale.
Le chantier est d'ores et déjà ouvert puisqu'il y a depuis le mois de novembre des réunions entre l'administration française par le biais de la direction des transports maritimes, l'office des transports de la Corse et Bruxelles. Nous allons déjà étudier les échanges de courrier...

JMR Et le ministère des Transports est, selon vous, impuissant ?

MP En tout cas, la distorsion de concurrence soulevée avec une grande justesse par Jean-François Mattei devant l'Assemblée nationale et toutes les questions qu'il a ainsi posées, inhérentes aux conditions d'armement, de navigation, de sécurité, et aux régimes sociaux et fiscaux sont demeurées à ce jour sans réponse.
Or, le gouvernement doit prendre ses responsabilités et agir auprès de la communauté européenne pour harmoniser les choses par le haut.

JMR Mais le débat dans l'hémicycle territorial ne viendra-t-il pas forcément avant la clarification souhaitée ?

MP C'est une crainte légitime mais le conflit de la CCM a eu l'effet d'un séisme dont l'onde de choc s'est largement propagée dans l'opinion. Le débat change de nature, on sort des poncifs et des oppositions traditionnelles.
Et si le souci de clarification est bien compris par tous, il est toujours temps d'étendre le planning avec l'Europe et d'envisager des délais supplémentaires pour ôter la moindre équivoque de textes trop diversement interprétés.

JMR Finalement, les turbulences de la CCM vous arrangent plutôt bien...

MP On peut le voir ainsi, mais nous sommes d'autant plus solidaires des personnels de la compagnie régionale et en phase avec son encadrement que, grâce à leur action, toute une île a pris pleinement conscience de la dimension sociale du problème.
Ce que nous demandons aujourd'hui, c'est bien la prise en compte du fait insulaire.
Le dogme européen peut se résumer ainsi : il faut diminuer le niveau des obligations de service public pour ouvrir le marché.
Comme nous ne sommes pas dans le schéma des Baléares avec plus quatre millions de passagers et que le marché est étroit avec une concurrence qui ne jouerait pas neuf mois sur douze, son application serait très préjudiciable, et pour les compagnies concernées et pour les usagers.

JMR Vous laissez ainsi entendre que la fréquence des liaisons en souffrirait ?

MP Une compagnie doit être bien gérée et une diminution significative de ses recettes aurait à la fois un impact sur sa trésorerie et sur ses prestations de service public qui diminueraient forcément en hiver.
Les mêmes qui réclament que soient desservies tout au long de l'année les villes de Propriano, Calvi et Porto-Vecchio et prônent en même temps la libéralisation totale du marché feignent d'ignorer leur propre contradiction.
Même la direction de la CCM s'interroge aujourd'hui sur l'opportunité de desservir Calvi comme avant.
Vous savez, on ne sous-estime pas le danger de l'opérateur qui va faire une offre, probablement moins disante, mais avec des conditions de confort, de sécurité et de personnel qui le seront aussi !
Plus qu'une simple procédure d'appel d'offres, c'est une vraie question de société qui se pose et je suis convaincu que les deux régions, Corse et PACA, ont tout intérêt à se parler.

JMR Il semble que la concurrence vous effraie...

MP Nous sommes déjà à des milles du monopole ! La concurrence a commencé sur Nice en 1996 et grâce à ses NGV, la SNCM a conquis les deux tiers du trafic passagers.
Les personnels vivent la concurrence de manière quotidienne mais ils demandent que l'Europe la tire vers le haut et ne lâche pas la bride à des sociétés qui la tirent vers le bas.
Propos recueillis par
Jean-Marc RAFFAELLI.


Négociations sociales

" Pour une obligation de résultats avant mars "

JMR La Corse peut au moins espérer que la procédure en cours constitue un solide rempart à de nouvelles velléités de grève...

MP D'abord, il existe aujourd'hui une pratique moderne de la relation intersyndicale et, sous l'impulsion notamment de l'encadrement, la cohésion se renforce avec les compagnies publiques du bord à bord. Nos contacts sont loyaux et approfondis à l'exemple de ceux noués avec le STC. Dans le souci de progresser, on examine moins les accords que les divergences. Ensuite, il y a eu de moins en moins de grèves car ont été prises en compte de plus en plus la volonté des Insulaires de se déplacer sans contrainte et les données économiques et commerciales de l'île. Les syndicats ont une attitude responsable. Notre proposition consiste à imposer une obligation de résultats avant le mois de mars dans les négociations sociales en cours. Bien sûr, si sept cents à mille emplois venaient à être menacés, nul ne s'étonnera qu'il y ait des conflits dans l'air...

Les enjeux

" Cinq à six cents emplois rapidement perdus... "

JMR Quels sont les enjeux sociaux de l'appel d'offres pour la compagnie ?

MP La SNCM et la CMN réunies représentent 2 700 salariés dont 730 emplois en Corse. Si, dans un système où la recette est assurée à 80 % l'été, elles perdaient tout ou partie du trafic de service public, ou bien si elles étaient contraintes à un trafic comparable sans le niveau des recettes actuel, cinq à six cents emplois disparaîtraient rapidement. Elles ne survivraient peut-être même pas au cap des cinq ans. Si la bagarre économique, qui a commencé sur Nice où finalement tout le monde travaille à perte, perdure et s'étend, les opérateurs publics sombreront avec les emplois, les prestations, la qualité de la desserte et de la flotte. Le transport maritime est une activité où la construction d'une Europe plus sociale prend tout son sens.


BLOG CFE-CGC SNCM

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