samedi 17 mars 2007

"jaunes" à l'assaut de la Corse, naufrageurs de la SNCM, mystères de la compagnie jaune, risque de dépeçage de la SNCM: tout a été dit à l'avance

Depuis cette époque tout a été dit à l'avance!

"Ferryweb: Septembre-Octobre 1999

Dernière mise à jour: jeudi 28 octobre 1999

DANIELLE CASANOVA (SNCM) : Festival du film à bord

Mairie de L'Ile-Rousse : Insatisfaction face à la programmation des NGV cet hiver

Réforme pavillon national: les armateurs français publient un livre blanc

HAPPY LINES : Après la saisie du HAPPY DOLPHIN à Bastia

LUXEMBOURG: Poursuites contre Tourship Group (Corsica Ferries)

Les poursuites judiciaires engagées contre la société Tourship Group S.A. sont maintenues par le parquet luxembourgeois malgré la publication des bilans récents de la société, a-t-on appris jeudi à Luxembourg de source judiciaire. Menacée de liquidation judiciaire par le Tribunal de Commerce de Luxembourg pour n'avoir pas déposé les bilans dans les délais légaux, Tourship Group S.A., qui est la maison-mère de Corsica Ferries et de Sardinia Ferries, a présenté ses bilans pour les années 1995, 1996 et 1997. Mais la société reste en infraction, car les bilans de 1996 et de 1997 ne portent pas sur les comptes consolidés de la société comme la loi l'y oblige, a indiqué jeudi à l'AFP Jean Engels, le Substitut du procureur d'Etat du Luxembourg. M. Engels a également précisé que les pertes de Tourship étaient trop importantes par rapport à son capital social. La perte totale du holding luxembourgeois au 31 décembre 1997 s'élevait selon M. Engels à 4,981 millions de francs suisses. En 1996, la perte totale était de 5,516 millions de francs suisses. Le capital social de la société s'élevait lui à 8,453 millions de francs suisses. Le parquet luxembourgeois a demandé en septembre dernier au Tribunal de commerce de Luxembourg la mise en liquidation de Tourship Group pour avoir enfreint de manière répétée la loi sur les sociétés. A la mi-septembre, les derniers bilans de Tourship disponibles au Registre de Commerce et des Sociétés remontaient au 31 décembre 1994. C'est à la suite d'une lettre de dénonciation d'un avocat luxembourgeois que le parquet a demandé la mise en liquidation de la maison-mère de Corsica Ferries. La menace de la liquidation judiciaire a amené les administrateurs de la société à se mettre partiellement en règle avec la loi. Le tribunal de Commerce de Luxembourg examinera le mardi 9 novembre la requête du tribunal réclamant la mise en liquidation. Si le Tribunal de Commerce prononce la faillite de la société, les conséquences pourraient être importantes pour ses filiales maritimes. La procédure prévoit la nomination d'un liquidateur qui doit alors réaliser les actifs de la société et de ses filiales, ce qui signifierait, par exemple, la vente des navires exploités par les différentes compagnies maritimes. Le scénario d'une liquidation est toutefois peu probable selon une source judiciaire puisque l'avocat de Tourship a remis les bilans jusqu'en 1997, même s'il s'agit seulement de bilan abrégés. Le parquet n'a pas exclu des poursuites pénales à l'encontre des administrateurs de la société, qui risquent des amendes pouvant aller jusqu'à 5 millions de francs luxembourgeois, s'il y a eu intention frauduleuse. (D'après l'AFP, 14.10.99) [Le groupe arme en Méditerranée les navires SARDINIA REGINA, CORSICA EXPRESS SECONDA, SARDINIA NOVA, SARDINIA VERA et SARDINIA EXPRESS sous pavillon italien, les navires CORSICA VICTORIA, CORSICA SERENA II et CORSICA MARINA II sous pavillon panaméen, et le navire CORSICA EXPRESS III sous pavillon français]"


Les "jaunes" à l'assaut de la Corse
http://www.lepoint.fr/content/economie/article?id=20432

Corsica ferries

Les « jaunes » à l'assaut de la Corse

21/07/2005 - © Le Point - N°1714

Très affaiblie par des conflits sociaux à répétition, la SNCM - entreprise publique - doit faire face à Corsica Ferries, la compagnie low cost. Celle-ci affiche de très beaux résultats commerciaux, mais pas mal de zones d'ombre.

L a tuile... Dans son immense bureau aux murs tout blancs, Bruno Vergobbi enrage. Nous sommes le 1er juillet et une bien mauvaise nouvelle vient de tomber sur la tête de celui qui dirige la SNCM depuis un an et demi. Un peu plus tôt dans la journée, alors que le « Napoléon-Bonaparte » accostait au port de Marseille, cette gigantesque cathédrale flottante a été drossée contre le quai par un violent coup de mistral. Verdict : avaries et immobilisation. La compagnie nationale inaugure donc la saison touristique en annulant la traversée de nuit entre Marseille et Ajaccio et en la repoussant au lendemain dans la journée.

Les années noires, la SNCM connaît. Mais ce que vit actuellement l'entreprise publique relève du calvaire. En avril, en pleine période de réservation des traversées estivales, il y a eu cette violente grève de deux semaines menée par la CGT. Bilan : une perte sèche de plusieurs millions d'euros et la défaite de la direction, qui voulait par un - généreux - plan social supprimer 210 emplois. Quelques semaines plus tard, nouveau coup dur : la Cour européenne de justice a jugé illégale l'aide de 76 millions d'euros accordée par l'Etat à la compagnie il y a trois ans. Et ce n'est pas fini : aujourd'hui, tandis que les équipes commerciales redressent petit à petit la barre pour remplir les navires, c'est un autre conflit que préparent déjà les tout-puissants syndicats - la CGT à Marseille et le STC (Syndicat des travailleurs corses) sur l'île de Beauté. Pour renflouer la compagnie, qui affiche des pertes abyssales (27 millions d'euros pour 200 millions de chiffre d'affaires), le gouvernement cherche un investisseur pour reprendre une partie du capital. Les discussions avec les financiers alléchés par les actifs de l'entreprise ont débuté. Mais les syndicalistes ont déjà annoncé la couleur : la privatisation, il n'en est pas question. Ils ne laisseront pas faire.

Des traversées à 5 euros.

Sale temps. D'autant qu'au même moment les « jaunes », eux, affichent complet et se frottent les mains... Les « jaunes », c'est comme cela que, sur les quais du port de Nice, Toulon, Ajaccio ou Bastia, on surnomme les bateaux de Corsica Ferries. Et pas seulement parce que la coque des navires du principal concurrent de la SNCM est couleur canari. Mais parce que, contrairement à ce qui se passe dans la compagnie publique, chez Corsica, « grève » et « syndicat » ne font pas vraiment partie du langage quotidien. Depuis la fin des années 90 et l'ouverture à la concurrence entre la Corse et le continent, cette compagnie privée qui possède une douzaine de bateaux et se cantonnait jusque-là au trafic Corse-Italie a remporté haut la main la bataille navale : elle transporte aujourd'hui plus de passagers que la SNCM... Rien qu'en 2004, alors que l'entreprise publique perdait 210 000 clients entre Marseille et les ports corses, Corsica Ferries augmentait, elle, le nombre de ses passagers entre le continent et l'île de Beauté de... 24 %.

Bastia, un immeuble moderne aux vitres fumées qui donnent sur le terminal portuaire où une noria de navires plus gros les uns que les autres chargent et déchargent dans leur ventre des armées de touristes, de camions et de caravanes. C'est ici que deux générations veillent aux destinées de Corsica. Pascal Lota, un septuagénaire vif, chevalière à l'auriculaire et costume élégant, fondateur et propriétaire de la compagnie, et Pierre Mattei, 41 ans, son bouillant directeur général aux allures de play-boy. Ce dernier qui, même lorsqu'il était étudiant à l'Essec à Paris, n'a jamais douté qu'il reviendrait dans son île pour travailler, jubile en faisant visiter son call center. En ce début juillet, dans cette grande pièce aux murs tapissés de posters de navires, des dizaines de jeunes gens armés d'oreillette et de micro vendent des places de bateaux pour l'été. Fierté aussi lorsqu'il présente les principaux cadres de la compagnie, tous corses et tous diplômés de grandes écoles. « Sur l'île, il n'y a pas 36 entreprises comme la nôtre qui se développent aussi vite, explique Pierre Mattei, qui travaille avec Lota depuis une quinzaine d'années. Nous sommes le troisième employeur local et beaucoup de jeunes rêvent de travailler chez nous. »

Pour réussir son pari, Corsica a pris modèle sur les compagnies aériennes à bas prix. Depuis quelques années, elle offre même (sous certaines conditions et à certaines dates) des trajets Corse-continent à... 5 euros ! Au grand dam de la concurrence : « Ces ventes à perte sont un véritable scandale, tempête Maurice Perrin, délégué CGC de la SNCM. Car nous, nous n'avons pas le droit de faire cela. Les "jaunes" font de la concurrence déloyale. »

L'actionnariat : un véritable maquis.

Autre clé du succès de Corsica : les rotations de ses bateaux, beaucoup plus rapides que celles de la SNCM. Ses employés (1 200 personnes) sont deux fois moins nombreux que ceux de la compagnie publique. Et surtout ses bateaux battent pavillon italien, ce qui permet à Corsica de bénéficier d'avantages fiscaux non négligeables. Quant aux marins, pour les lignes Italie-Corse, ils peuvent être de toutes nationalités. Entre la Corse et le continent, tandis que la SNCM n'emploie que des Français, Corsica Ferries peut, elle, faire travailler des marins venus de toute l'Europe. A condition toutefois de respecter le droit social français et les salaires minimaux français. « Tout ça, c'est sur le papier, accuse Jean-Paul Israël, le patron de la CGT à la SNCM. Car dans la réalité, ils ne respectent pas la loi et font même travailler des Cubains, qu'ils paient une misère. » Des affirmations que jamais les Affaires maritimes n'ont pourtant confirmées. En fait, plus que les différences salariales, c'est surtout la productivité des marins et les avantages obtenus par les salariés de l'entreprise publique au fil des ans qui font la différence. Un exemple : il existe une cinquantaine de primes aux appellations différentes à la SNCM, tandis que Corsica n'a qu'un titre de gloire sur le plan social : elle est la première entreprise corse à avoir fait passer ses salariés français (environ 20 % de l'effectif total) aux 35 heures...

Mais ces beaux succès suscitent aussi d'innombrables interrogations. Et sur le plan financier d'abord. Corsica Ferries est un empilement de sociétés et de filiales dans lequel il est quasi impossible de se retrouver... N'est enregistrée à Bastia qu'une modeste PME qui commercialise des voyages en bateau et dont les comptes, déposés l'an passé en retard, font sourire bien des analystes. Elle n'affiche qu'un dérisoire profit de 88 000 euros pour un chiffre d'affaires global dépassant 150 millions d'euros.

Chaque navire de Corsica est aussi une société à part entière enregistrée en Italie, un montage fréquent dans le secteur maritime. L'actionnariat de l'entreprise ressemble, en revanche, à un véritable maquis. Le groupe Lota Maritime a été créé en 1998 par Tourship SA, un groupe luxembourgeois et par les membres de la famille Lota, regroupés dans un holding baptisé Lozali, basé en Suisse, à Genève, sur lequel il est difficile d'obtenir des informations financières précises. Si ce n'est que son président est l'un des ex-dirigeants de la banque du Gothard, une banque italienne filiale d'une Banque suisse également implantée à Monaco.

Lorsqu'on l'interroge sur ces mystères, Pascal Lota croise ses jambes et se passe une main sur l'autre en affichant un malin sourire, celui du patriarche à qui on ne la fait pas : « Racontez ce que vous voulez. On a dit que j'étais le prête-nom de la Mafia italienne. Un journaliste a écrit que mon entreprise recyclait l'argent du Vatican... Mais tout cela, c'est "Mickey Magazine"... Les choses sont pourtant très simples : j'ai un gendre hollandais. Et un autre norvégien : contrairement à moi qui suis contribuable depuis toujours à Bastia, eux n'ont aucune envie de payer leurs impôts en France... » Et de tempêter contre ces campagnes de dénigrement menées, selon lui, par la SNCM. « C'est agaçant d'avoir à se justifier en permanence, poursuit Lota. On ne nous accorde pas la présomption d'innocence et cela déstabilise le personnel. » L'agacement de Pascal lota est d'autant plus vif qu'en mai les députés communistes à l'Assemblée nationale ont demandé la création d'une commission d'enquête parlementaire sur Corsica Ferries. But : savoir où passent les 10 millions d'euros de subventions que reçoit chaque année Corsica au titre de la continuité territoriale. Même si celle-ci n'a que très peu de chances d'aboutir (la démarche est ouvertement menée à l'instigation de la CGT de la SNCM), voilà qui fait mauvais effet.

Sympathies indépendantistes ?

Outre l'opacité de ses structures financières, la réputation de l'entreprise est fréquemment mise à mal. En juin, elle était condamnée à 490 000 euros d'amende et l'un de ses capitaines à six mois de prison avec sursis. Raison de cette lourde condamnation : un des navires jaunes s'est fait surprendre par la Marine nationale en train de dégazer dans une zone naturelle protégée. « C'était un accident, explique, furax, Pierre Mattei, qui, dans cette affaire, s'est mis à dos tout ce que l'île compte d'amoureux de la nature et refuse d'être catalogué comme un voyou des mers. Nous n'avons aucun intérêt à renverser nos poubelles sur la moquette du salon. »

Ce n'est pas tout. Sur le port de Bastia, un autre sujet alimente aussi les conversations : les liens familiaux de Pierre Mattei, qui fut, dans ses années d'étudiant à l'université de Corte, l'animateur d'un mouvement de jeunes indépendantistes. Et qui est surtout le jeune frère de l'égérie des nationalistes, Marie-Hélène Mattei, longtemps avocate de la Cuncolta, ancienne compagne de François Santoni (l'ex-leader du FLNC-Canal historique assassiné en 2001), puis de Charles Pieri, un autre leader indépendantiste...

Pierre Mattei n'aime pas que l'on aborde le sujet : « Je suis mandataire social. Vous m'excuserez mais je ne parle pas de politique. » De tels liens jouent-ils un rôle dans la belle réussite des jaunes ? Certains des détracteurs de Corsica le croient. Et pointent du doigt les grèves de septembre 2004 à la SNCM menées par le Syndicat des travailleurs corses (indépendantiste) que dirige Alain Mosconi (voir encadré). Un conflit qui a coûté 8 millions d'euros à l'entreprise publique et 50 000 passagers évidemment récupérés par Corsica... « Quand la CGT fait grève à Marseille et bloque les navires SNCM, vous croyez qu'elle passe d'abord un coup de fil à Corsica Ferries ? Tout cela, ce n'est que foutaises », s'énerve Alain Mosconi, qui n'a d'ailleurs pas de mots assez durs contre le duo Mattei-Lota. « Ils mettent une tête de Maure sur leurs bateaux, mais c'est juste pour le folklore : ils ne créent pas d'emplois en Corse et nous empêchent de mettre en place une section syndicale chez eux. Ils font de l'argent, c'est tout. »

Un vieux sage de la vie politique corse peu suspect de sympathie pour les indépendantistes balaie ces rumeurs d'un revers de la main : « Voir un complot nationaliste derrière les succès de Corsica relève du fantasme. Je crois sincèrement que le jeune Mattei veut réussir. Et pour cela, il est aussi à l'aise avec les amis de sa soeur qu'avec un Camille de Rocca-Serraou un Emile Zucarelli [le maire de Bastia, PS, NDLR]. Nous sommes en Corse, tout de même. » [président UMP de l'Assemblée de Corse, NDLR]

Face à toutes ces critiques (elles sont largement alimentées par les syndicats de l'entreprise publique), Pierre Mattei s'énerve. « C'est la SNCM qui est malade et c'est nous qui serions les voyous ! C'est surréaliste. Notre réussite gêne la SNCM, son personnel et l'Etat, puisque nous montrons qu'il est possible de faire le même boulot qu'eux sans perdre des dizaines de millions d'euros chaque année. Ils préfèrent nous détruire plutôt que d'essayer de se soigner. C'est consternant, car c'est eux qui coûtent cher au contribuable. »

En attendant, à Marseille, Bruno Vergobbi, le patron de la SNCM (elle a compté six pdg en dix ans), voit de nombreux nuages se profiler au-dessus de la SNCM en 2006. « Bruxelles interdit à l'Etat de nous aider davantage financièrement. Vu nos pertes, il nous faut au plus vite un électrochoc. Et passer d'une culture trop administrative à une vraie culture d'entreprise. Nous n'avons que quelques mois », confie Vergobbi. Seule certitude : l'an prochain, la collectivité de Corse doit lancer un nouvel appel d'offres pour les services de continuité territoriale. Enjeu : une subvention de 70 millions d'euros par an dont profitait jusque-là la SNCM. Si la compagnie publique perd l'appel d'offres, ce sera le dépôt de bilan. Les jaunes rafleront alors la mise...

Les « vrais » patrons de la SNCM...

I l y a quelques années, Jean-Paul Israël était cuistot sur un des navires de la SNCM et déjà un cégétiste très actif. Celui qui est aujourd'hui le patron des marins CGT du port de Marseille avait repéré une forte tête parmi les nouveaux embauchés. Du bon pain pour le syndicat. Il avait réussi à convaincre le petit jeune de prendre sa carte. Une vieille histoire... Car Alain Mosconi, le petit jeune d'alors, a vieilli et a, surtout, coupé les ponts avec la CGT depuis longtemps.

Patron des marins du STC (Sindicatu di i travagliadori corsi, le syndicat des travailleurs corses, nationaliste), Mosconi fait aujourd'hui la pluie et le beau temps sur les quais des ports de l'île de Beauté pendant que Jean-Paul Israël, lui, « tient » le port de Marseille, qu'il arpente depuis près de trente ans et où sa longue barbe est connue de tous.

Aujourd'hui, tout sépare les deux hommes. A commencer par ce conflit de septembre 2004 déclenché par Mosconi, qui a bloqué plusieurs jours les navires de la SNCM pour exiger la « corsisation » des emplois. « Ce sont les Corses et la collectivité territoriale qui font vivre sous perfusion la SNCM. Nous demandons que, lors des futures embauches, priorité soit donnée aux résidents corses, qui aujourd'hui sont en minorité dans l'entreprise », explique Mosconi. Pour lui, les choses seraient plus claires si la collectivité de Corse reprenait tout simplement la SNCM et l'exploitait directement. « Il n'y aurait plus de vol. »

Jean-Paul Israël refuse ce discours. Pour lui, la grève de Mosconi fut une grave erreur : elle consistait à « ethniciser la compagnie en créant un système de quotas » . Quant aux difficultés de la SNCM, pour lui, pas de doute : « La rentabilité de l'entreprise publique ne doit pas être un objectif central. L'Etat doit assumer ses responsabilités. » Il affirme d'ailleurs déjà préparer la prochaine grève au cas où l'Etat ouvrirait le capital de la SNCM. Et en matière de grève, il s'y connaît : il fut le principal animateur de celle d'avril qui a fait perdre à l'entreprise publique plusieurs millions d'euros. R. G.



Les naufrageurs de la SNCM
http://www.lexpress.fr/info/france/dossier/corse/dossier.asp?ida=430982

L'Express du 20/12/2004

Transports

Les naufrageurs de la SNCM

par Benjamin Masse-Stamberger

Les nationalistes, le concurrent Corsica Ferries, des patrons, certains élus territoriaux... ils sont nombreux, dans l'île, à miser sur la disparition de la compagnie nationale. Qui entame une périlleuse restructuration

rappé aux couleurs de la Société nationale maritime Corse-Méditerranée (SNCM), le Pascal Paoli trône majestueusement dans le port de Bastia en cette journée ensoleillée de décembre. Routine tranquille, son ventre avale hommes et marchandises en prévision du prochain départ vers Marseille, où se trouve le siège de la compagnie. Mais ce calme est trompeur: deux mois après la grève déclenchée par le Syndicat des travailleurs corses (STC) - branche «sociale» du mouvement nationaliste qui, dans le cadre d'une stratégie de «corsisation des emplois», a bloqué durant près de trois semaines les navires de la compagnie - la SNCM bataille toujours, dans la tempête, pour ne pas sombrer.

Car le bilan du conflit est lourd: plus de 50 000 passagers perdus au profit du concurrent honni, la société privée Corsica Ferries, et 8 millions d'euros de pertes enregistrées. Ce manque à gagner ne fait qu'aggraver les difficultés d'une compagnie qui peine, par ailleurs, à se réformer: en 2004, après une saison touristique morose, elle devrait totaliser 30 millions d'euros de déficit, pour des ventes estimées à un peu moins de 200 millions. Dans l'attente d'un plan de restructuration, qui doit être annoncé aux 2 400 salariés début janvier, la question de la survie de la société se trouve désormais clairement posée.

«Favoriser l'émergence d'une compagnie régionale»

Au regard de ce paysage dévasté, les concessions obtenues par le STC - un «rééquilibrage» des embauches en faveur des «résidents en Corse», déjà accordé six mois plus tôt - paraissent dérisoires. Voire surréalistes, quand on sait que, compte tenu de la situation de la compagnie, les embauches ne sont guère à l'ordre du jour. «Et pas plus de Corses que de Provençaux ou de Moldovalaques!» ironise, amer, un syndicaliste marseillais. Qui ajoute, sibyllin: «Si l'on avait voulu couler la compagnie, on ne s'y serait pas pris autrement.» Ce qu'exprime à sa façon Bruno Vergobbi, le PDG de la SNCM: «Nos soucis arrangent beaucoup de monde.»

Incontestablement, nombre d'acteurs politiques et économiques corses verraient d'un bon oeil l'émergence, sur les cendres de la SNCM, d'une compagnie maritime pilotée par les instances régionales. Et certains ont décidé de passer à l'offensive...

Fidèles à leurs vieilles habitudes, les nationalistes ont tiré les premiers: en août dernier, Corsica Nazione et Indipendenza se prononçaient pour le remplacement de la SNCM par une «compagnie maritime corse». Hasard ou coïncidence, un mois plus tard débutait le blocage des navires de la compagnie nationale par quelques dizaines de militants du STC. Secrétaire général du syndicat nationaliste, Alain Mosconi ne fait d'ailleurs pas mystère de ses intentions: «Favoriser l'émergence d'une compagnie régionale sous l'égide de la Collectivité territoriale de Corse [CTC].»

Du côté du concurrent, la Corsica Ferries, l'heure est également à la guerre ouverte avec la compagnie nationale. Fondée en 1968, à Bastia, par Pascal Lota, la société s'est longtemps spécialisée dans le trafic entre la Corse et l'Italie. Mais l'ouverture à la concurrence des liaisons avec le continent, imposée à la France par Bruxelles à partir de 2002, ouvre une brèche dans laquelle la compagnie s'engouffre audacieusement. Depuis lors, grâce à une politique commerciale agressive, inspirée des compagnies aériennes low cost, et à une flotte sans doute mieux adaptée au marché que celle de la SNCM, la compagnie aux bateaux jaunes n'a cessé de tailler des croupières à sa concurrente. La Corsica Ferries s'est ainsi hissée en quelques années au rang de première compagnie desservant la Corse, avec plus de 1,6 million de passagers transportés en 2003, contre seulement 1,2 million pour la SNCM. Une suprématie acquise au prix d'une guerre tarifaire sanglante, la Corsica Ferries allant jusqu'à proposer des traversées à 5 € par passager. La SNCM soupçonne évidemment «les jaunes» de faire de la vente à perte pour la couler. «En 2003, nous avons réalisé 160 millions de ventes, pour un résultat équilibré», rétorque Pierre Mattei, directeur général de la Corsica, qui refuse de «jouer les boucs émissaires».

Des alliés inattendus

Pas si simple, en réalité: le groupe de Pascal Lota compte en effet plus d'une dizaine de sociétés - dont la Corsica Ferries - et son holding de tête (Lozali), après avoir été localisé au Luxembourg, est désormais basé en Suisse. «Autant dire, estime un expert, que la santé financière du groupe est difficile à apprécier...»

Autre motif de ressentiment pour la SNCM: Corsica, la compagnie à la tête de Maure, malgré sa «corsitude» proclamée, emploie très peu de marins insulaires, une grande majorité étant plutôt italiens, voire cubains ou panaméens. «Pourquoi le STC a-t-il bloqué nos bateaux et pas ceux de la Corsica Ferries?» s'interroge, un brin provocateur, Guy Barbolini, délégué de Force ouvrière à la SNCM.

Une question à laquelle certains, sur le port de Marseille, n'hésitent pas à apporter une réponse tranchée: «Pascal Lota s'est couvert auprès des ''natios'', avance ainsi un syndicaliste, en nommant Pierre Mattei à la tête de la compagnie.» Frère de Marie-Hélène Mattei, égérie du mouvement nationaliste et ancienne avocate d'A Cuncolta, Pierre Mattei fut en effet lui-même, dans les années 1980, un des dirigeants du syndicat indépendantiste étudiant CSC (Consulta di i studienti corsi), par lequel sont passées nombre de figures du nationalisme, comme Alain Orsoni ou François Santoni.

Le secrétaire général du STC, Alain Mosconi, balaie cependant d'un revers de main toute idée de complaisance à l'égard d'une compagnie «au service de quelques nantis, et non du peuple corse dans son ensemble».

Au cours de la grève, le Syndicat des travailleurs corses s'est cependant découvert d'autres alliés inattendus: les milieux libéraux et le patronat corses ont en effet volé à son secours en affirmant, à leur tour, la nécessité de mettre en place «une autre politique des transports pour la Corse et de la confier prioritairement aux acteurs locaux».

Face aux manœuvres, certains syndicalistes se retournent vers l'Etat

Mais, si autant de voix peuvent se prononcer, à mots plus ou moins couverts, pour la mise en place d'une compagnie régionale, c'est bien parce que, grâce au «statut Joxe» de 1991, la Corse s'est vu attribuer des compétences élargies en matière de politique des transports. A cet égard, c'est la Collectivité territoriale de Corse, aujourd'hui dirigée par la droite, qui se trouve au centre du jeu. C'est notamment elle qui, par le biais de son office des transports, est chargée de répartir les quelque170 millions d'euros alloués chaque année à la Corse par l'Etat au titre de la «continuité territoriale». Pour cela, elle établit un cahier des charges, avant de lancer - Bruxelles oblige - un appel d'offres pour les différents services définis. Le prochain appel d'offres, qui sera organisé en 2006, représentera ainsi un enjeu crucial pour la SNCM, qui touche actuellement 70 des 105 millions attribués au seul transport maritime. «Si la collectivité décide, par exemple, d'exclure le transport de passagers de la dotation, cela aura des conséquences dramatiques pour la compagnie», explique ainsi un bon connaisseur du dossier.

Bien sûr, explique Ange Santini, président de l'exécutif corse, l'unique objectif de la CTC en la matière est d' «assurer la qualité et la continuité du service public de transport entre la Corse et le continent». Mais la CTC n'est pas un arbitre entièrement neutre: en cas de création d'une compagnie régionale, c'est en effet elle qui se retrouverait directement aux manettes.

Déjà, le président UMP de l'Assemblée de Corse, Camille de Rocca Serra, a tâté le terrain en déclarant qu' «il faudrait peut-être scinder en deux la SNCM, avec une partie desservant la Corse, l'autre le Maghreb». Quant au choix du cabinet chargé par la CTC de la consultation qui servira de base à la nouvelle politique des transports, il n'a pas non plus contribué à rassurer les syndicats: il s'agit du cabinet de conseil de Marc Simeoni, fils du dirigeant nationaliste Edmond Simeoni, et lui-même soupçonné d'avoir hébergé Yvan Colonna lors de sa cavale. «La Corse, justifie un élu local, est petite...»

Face aux manœuvres, certains syndicalistes de la SNCM se retournent, selon la coutume, vers l'Etat. Mais celui-ci, pris en sandwich entre Bruxelles et la région, a beau jeu de rappeler que, après la recapitalisation de 2003, tout renflouement de la compagnie lui est désormais interdit. Or la société a de nouveau besoin d'argent frais pour moderniser sa flotte, réformer un mode de fonctionnement trop rigide et poursuivre sa politique de diversification en direction du Maghreb. Le plan de restructuration, qui inclura à n'en pas douter un important plan social, pourrait ainsi également prévoir l'ouverture du capital à un acteur privé.

Reste à savoir comment il sera accueilli par les salariés. Avant même d'en connaître les contours exacts, le STC annonce ne pas vouloir en discuter avec des dirigeants qualifiés de «pantins». Quelle sera la position des autres syndicats, et notamment de la CGT, majoritaire dans l'entreprise? De leur attitude, en tout cas, dépendra en grande partie le sort de la compagnie...



3. Les mystères de la Compagnie jaune
Economie & Social | 11-2004 | Numéro: 62 | Patrick Vinciguerra | 198 lignes | Papier | Prix 2.16E
L’insolente réussite de la Corsica Ferries, devenue la première compagnie maritime desservant la Corse, suscite interrogations et crainte. Les syndicats de sa concurrente publique, la SNCM, dénoncent une concurrence déloyale et une gestion des comptes pour le moins opaque…
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Mensuel CORSICA (Bastia) Novembre 2004
www.CLUB-CORSICA.COM

Par Patrick Vinciguerra

Les mystères de la Compagnie jaune

L'insolente réussite de la Corsica Ferries, devenue la première compagnie maritime desservant la Corse, suscite interrogations et crainte. Les syndicats de sa concurrente publique, la SNCM, dénoncent une concurrence déloyale et une gestion des comptes pour le moins opaque…

Le malheur des uns fait le bonheur des autres, le domaine maritime n'échappe pas à la règle. Pour s'en convaincre il n'y a qu'à lire ces quelques lignes extraites de la publication d'octobre de l'Observatoire régional des transports de la Corse : « Huit ans après avoir inauguré ses premières lignes entre la Corse et Nice, la Corsica Ferries fête son millionième client sur les lignes françaises (sur 12 mois) et devient le leader du transport de passagers maritimes entre la Corse et le continent français. De manière concomitante, la SNCM enregistre son plus mauvais exercice en passant pour la première fois depuis sa création (en 1976) sous la barre du million de passagers transportés sur 12 mois. » Il faut dire - personne n'a oublié les deux semaines de grève du STC - que l'opérateur public a vécu un « septembre noir » : seulement 29 736 passagers transportés (soit - 77 % par rapport à 2003), pertes partiellement absorbées par la Corsica Ferries qui progresse dans le même temps de 81 %. Mais ces éléments conjoncturels n'expliquent pas tout - tant s'en faut. Depuis belle lurette déjà, depuis en réalité l'ouverture des lignes françaises à la concurrence (en 1996), la « tornade jaune » fait tanguer la SNCM. « Nous avons tout simplement su nous adapter plus vite que les autres », assure Pierre Mattei, directeur général de la Corsica Ferries. « Elle (la Corsica Ferries, N.D.L.R.) n'obéit pas aux mêmes règles du jeu que nous », accuse Maurice Perrin, secrétaire général de la CGC à la SNCM.
« Personne n'a jamais réussi à remonter les sources de financement. C'est une jungle ! » Fondée en 1968 par Pascal Lota, la Corsica Ferries a son siège à Bastia, face à la mer, dans un bâtiment de verre. Un gage de transparence ? Pas vraiment. Primo, seuls les initiés sont en mesure de démêler l'écheveau de sociétés dont fait partie la compagnie, un véritable système de poupées russes. Corsica Ferries France est une entreprise de droit français qui appartient au groupe Lota Maritime, crée en 1998 sur la base de sociétés déjà existantes détenues par la famille bastiaise et Tourship SA, groupe luxembourgeois, le tout coiffé depuis peu par une holding basée en Suisse (hors Union Européenne). « Personne n'a jamais réussi à remonter les sources de financement. C'est une jungle ! », lâche Bernard Marty de la CGT/SNCM. « C'est un montage financier abracadabrantes que qui cache forcément quelque chose », renchérit Maurice Perrin, la voix pleine de sous-entendus. Mais quoi ? Une situation financière « fragile », « des pertes supposées », si l'on en croit deux audits. Dans le premier, réalisé en 2000 par le cabinet Deloitte et Touche, on apprend que tous les navires de la compagnie sont hypothéqués et que les dettes de Tourship Group frôlent le million d'euros. Plus récemment, en 2003, le cabinet Alpha - après des investigations menées à la demande du comité d'entreprise de la SNCM - concluait à « une situation financière précaire de Tourship (à des résultats structurellement déficitaires de Corsica Ferries France) et présentait Lota Maritime comme « une holding financière fragile ». Et les syndicats de la compagnie nationale de s'interroger : « Pourquoi la forte croissance d'activité de la Corsica Ferries ne se traduit pas par un redressement des comptes ? ». Leur réponse est simple : « C'est à ce prix, en rendant également difficile l'accès à ses comptes, que la compagnie aux bateaux jaunes peut se livrer à une guerre commerciale extrême et pratiquer le dumping social ». Des insinuations qui n'ébranlent pas Pierre Mattei, bien que ce dernier préfère manifestement parler d'autres choses (« Nous sommes la seule compagnie maritime à avoir son siège en Corse, nous sommes la troisième entreprise de l'île, nous y dépensons 30 millions d'euros… »). Au-delà de cette antienne, le numéro deux de la compagnie avance tout de même un chiffre d'affaires de 100 millions d'euros pour 2003 - alors que le propre dossier de presse de la compagnie donne un chiffre largement supérieur, 146 millions d'euros (?) -, et un bénéfice de 88 000 euros, un simple pourboire pour une entreprise de cette taille.
Autre mystère entourant la compagnie aux bateaux jaunes : la politique sociale. Le Syndicat des Travailleurs Corses, jusque-là discret sur le sujet, s'est livré début octobre à une attaque en règle, dénonçant « l'apparence corsiste de la Corsica Ferries qui cache une volonté hégémonique et mercantile ». La section des marins STC de la SNCM ne mâche pas ses mots, elle pointe des règles sociales a minima, des conditions de travail déplorables, les marins - à très grande majorité italiens - rempliraient plusieurs fonctions sur les navires… Alain Mosconi, le secrétaire national du STC, stigmatise la logique de marché de l'opérateur privé mû par le seul profit. L'argument est un peu facile, voire simpliste. N'empêche, si les conditions des marins de la Corsica Ferries étaient meilleures que celles de la SNCM, cela se saurait, la Corsica Ferries ne se priverait pas de le faire savoir. La CGT de la SNCM parle de « distorsion de concurrence », de salaires inférieurs de 30 %. « Nous avons bien essayé de monter une section syndicale, mais l'accès à bord nous est interdit et il n'y a que des Italiens, alors… », confie Bernard Marty, résigné. Même son de cloche du côté du STC, la culture syndicale ne serait pas du goût des Lota. Seule en fait la CFDT - discrète comme une mer d'huile - est représentée, des « jaunes » raillent leurs détracteurs.
En attendant, alors que la SNCM prend l'eau de toute part, Pascal Lota se frise les moustaches qu'il n'a pas. Et si au moment du renouvellement de la concession de service public en 2006, la Corsica Ferries s'avérait être l'unique alternative… La Corse entrerait dans l'ère du « monopole jaune ».

La Corsica Ferries en chiffres
- Chiffre d'affaires :
146 millions d'euros (3,2 % par rapport à 2002)
- Nombre de lignes :
12 lignes dont 6 depuis Nice et Toulon et 6 depuis l'Italie
- La flotte :
12 navires dont 3 Méga Express, 3 NGV, 3 Cruise Ferries et 3 Day Ferries
- Effectifs :
1 200 dont 300 résidents corses
- Agences commerciales :
Bastia, Toulon, Nice, Paris, Lyon et Marseille
- Nombre de passagers :
1 693 051 sur la Corse et 720 000 sur la Sardaigne(2003)

Patrick Vinciguerra

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La Tribune - 03/11/04 - 1304 mots
Hommes et Stratégies

La SNCM risque le dépeçage Qu'elles viennent des nationalistes, des libéraux corses ou de son concurrent Corsica Ferries, les attaques subies par la SNCM ces derniers mois ont considérablement fragilisé une entreprise déjà mal en point. La compagnie maritime ne pourrait survivre à une régionalisation ou une subvention de continuité territoriale limitée au fret.
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JDD, 10 juillet 2005 Le périlleux sauvetage de la SNCM

"L'enteprise publique qui fait la liaison entre la Corse et le continent est à vendre. ... Les candidats au rachat restent discrets. Marseille Envoyé spécial Yann Philippin
,
alors que l'Etat actionnaire finalise les négociations avec les futurs investisseurs privés. Une entreprise publique bien plus difficile à vendre que Gaz de France ou les autoroutes. Plombée par les grèves à répétition, les erreurs de gestion, la conjoncture (prix du pétrole, faiblesse du tourisme) et la concurrence de l'armateur privé Corsica Ferries, la SNCM sort d'une année 2004 catastrophique : 27 millions d'euros de pertes pour moins de 200 millions de chiffre d'affaires. La compagnie risque toujours la cessation de paiement, malgré un chèque de 69 millions signé il y a trois ans par l'Etat.
Le gouvernement assure avoir reçu plusieurs « offres préliminaires ». La Connex (la filiale transport de Véolia Environnement) ainsi que des fonds d'investissement seraient prêts à tenter l'aventure. Thierry Breton, ministre de l'Economie, et Dominique Perben, ministre des Transports, vont choisir l'heureux élu « dans les prochaines semaines ». Sa mission : injecter de l'argent frais et réaliser les réductions d'effectifs que l'Etat n'a pas osé faire. Le futur patron pourrait avoir les mains libres : le gouvernement céderait volontiers la majorité du capital.

Depuis l'an dernier, la SNCM est largement distancée par son rival honni Corsica Ferries (voir le graphique ci-dessous).
L'armateur bastiais aux bateaux jaunes a engagé une guerre sans merci contre l'entreprise publique. Propriété de la famille Lota, la compagnie a misé sur les ports de Toulon et Nice, plus proches de la Corse, donc moins chers que Marseille. Corsica Ferries séduit les passagers avec des tarifs cassés inspirés des compagnies aériennes à bas coûts. A partir de 5 € par passager et 1 € par voiture, hors taxes. La SNCM et ses syndicats hurlent à la concurrence déloyale. « Corsica Ferries s'abrite derrière un holding immatriculé en Suisse, bénéficie des avantages du pavillon italien et pratique le dumping social pour nous couler », accuse Maurice Perrin, délégué CGC. S'appuyant sur un rapport commandé en 2003 par le comité d'entreprise, il soupçonne son concurrent de pratiquer la vente à perte. Corsica Ferries nie. « Nous sommes bénéficiaires, et nos marins profitent des mêmes conventions sociales qu'en France », rétorque son directeur général Pierre Mattei.
La prochaine bataille va se jouer à la collectivité territoriale de Corse. L'an prochain, celle-ci va redistribuer ses aides aux compagnies qui assurent la continuité territoriale. Jusqu'ici, la SNCM se taillait la part du lion : 70 millions d'euros par an, contre 10 millions pour Corsica Ferries. Conservera-t-elle cet avantage ?
« Dans le cas contraire, la société n'y survivrait pas, ou alors au prix d'un plan social massif », prévient Bruno Vergobbi."
- service économie Le Journal du Dimanche

Article du journal de la Corse du 21 octobre 2005 intitulé
"CF
contre CX"

Dans le corps de cet article on trouve: "Devenue « une grande », la compagnie de Pascal Lota présente toutefois un talon dAchille. Disposant de peu de fonds propres, elle recourt beaucoup au crédit bancaire pour financer sa croissance. Cette réalité, ajoutée au choix du «low cost» et aux importants investissements réalisés ces dernières années (achat de trois mégas express, un quatrième en cours, fait que l'équilibre financier de Corsica Ferries exige une progression constante du chiffre daffaires. Pour conforter sa position de nouveau leader elle doit donc toujours aller de l'avant et grandir encore. "

En ligne sur www.jdcorse.com les parties en gras dans le corps du texte sont de l'émetteur

"CF contre CX
Avec la fin de la grève à la SNCM et l'évitement du dépôt de bilan, les aspects purement économique et commercial du dossier Transport maritime reviennent au premier plan. Dans les prochains mois, le transport Corse / Continent sera le théâtre dune bataille navale acharnée.

La SNCM est désormais sur les rails de la privatisation. Ce nouvel ordre des choses est de nature à modifier considérablement le paysage du transport maritime Corse / Continent. Une bataille d'envergure est plus que probable. Compagnie ambitieuse, Corsica Ferries, voudra grandir encore et engranger de nouveaux succès commerciaux. Compagnie blessée, la SNCM, du fait de la privatisation, aura à coeur de réagir et d'acquérir une culture de conquête des marchés.

Corsica Ferries : l'obligation de grandir encore
Historiquement positionnée sur les liaisons maritimes Corse / Italie, Corsica Ferries est venue tardivement sur les lignes Corse / Continent. Cependant, en exploitant des lignes Corse / Nice puis Corse / Toulon, elle a progressivement accédé au rang de numéro 1 des opérateurs desservant la Corse («détrônant» la SNCM). Aujourd'hui, Corsica Ferries est forte de 11 navires (dont trois Méga Express)
et détient la concession du port roulier de Savone (Italie). En 2004, son chiffre d'affaires a été de 170 millions deuros, la même année elle a transporté plus de 2,5 millions de passagers sur les différentes lignes qu'elle exploite en Méditerranée occidentale. Pour devenir numéro 1 de la desserte de la Corse, elle a recouru à une offre importante et diversifiée de passages ainsi qu'à une politique tarifaire attractive inspirée du "low cost" aérien. Cette présence et cette agressivité commerciale lui ont permis de transporter plus de 1,5 millions de passagers sur la Corse depuis la France et l'Italie (le double du chiffre réalisé par la SNCM). Corsica Ferries a aussi usé au mieux de l'entrée en vigueur de l'aide sociale. Subvention versée pour assurer le transport de certains types de passagers (résidants insulaires, familles nombreuses*), l'aide sociale lui a permis de développer son activité Corse / Continent et sa politique de bas prix. Elle a, par ailleurs, judicieusement exploité les opportunités commerciales délaissées par une SNCM frileuse et immobiliste. Absente sur le marché Corse / Italie et incapable d'établir une politique tarifaire attractive, la compagnie dite nationale a laissé le champ libre à sa concurrente. Enfin, Corsica Ferries a su réduire ses coûts de personnel à partir d'une utilisation pragmatique des pavillons. Il convient également de reconnaître quelle n'a pas été affectée par des conflits sociaux à répétition. Devenue « une grande », la compagnie de Pascal Lota présente toutefois un talon dAchille. Disposant de peu de fonds propres, elle recourt beaucoup au crédit bancaire pour financer sa croissance. Cette réalité, ajoutée au choix du «low cost» et aux importants investissements réalisés ces dernières années (achat de trois mégas express, un quatrième en cours, fait que l'équilibre financier de Corsica Ferries exige une progression constante du chiffre d'affaires. Pour conforter sa position de nouveau leader elle doit donc toujours aller de l'avant et grandir encore.

SNCM : l'atout Connex
En plaidant pour que l'aide sociale soit le seul dispositif d'aide pour le trafic passagers de service public et en se prononçant pour la suppression de l'enveloppe forfaitaire de continuité territoriale, les dirigeants de Corsica Ferries agissent en stratèges éclairés. Ils entendaient conforter en partie la croissance de la compagnie en provoquant la mise à l'écart d'une SNCM incapable de se réformer et de s'adapter à un marché devenant ouvertement concurrentiel. La privatisation de cette dernière risque fort de compliquer leur tâche . Le maintien ou non de l'enveloppe forfaitaire de continuité territoriale ne suffira pas à déterminer l'issue du rapport de force entre les « jaunes» et les «bleus ». La bataille sera globale. De plus, Corsica Ferries devra se méfier dun caniche devenu pitbull. En effet, avec le processus de privatisation, un « géant » vient d'entrer en campagne. Filiale du « super géant » Veolia Environnement, Connex représente un chiffre d'affaires de 3,6 milliards d'euros et emploie 61 288 personnes. Figurant parmi les premiers opérateurs privés européens de transport public de voyageurs, elle maîtrise les techniques routières et ferroviaires adaptées aux différents types de déplacements urbains, interurbains et régionaux. Cette société développe également des activités logistiques auprès des industriels. Il va sans dire qu'associée à Butler qui dispose de fonds considérables, elle représente un concurrent redoutable. D'autant qu'elle ne part pas de rien. Au plan financier, dans un premier temps, elle pourra compter sur les apporteurs traditionnels de la SNCM. D'une part, la Compagnie Générale Maritime et Financière injectera 25 millions d'euros pour assurer la trésorerie. Dautre part, l'Etat participera au financement du plan social, assurera 113 millions d'euros de reprise de dette et apportera 7 millions de recapitalisation. Au plan commercial, Connex pourra s'appuyer sur la présence traditionnelle de la SNCM dans le domaine du transport de passagers, de véhicules et de fret ainsi que sur une activité diversifiée (croisières, fret, transit international commercialisation de voyages et de produits touristiques). Nul doute qu'elle saura « élaguer les branches mortes » et « muscler » les activités ayant de l'avenir. Par ailleurs, elle pourrait pousser la SNCM à entrer sur le marché Corse / Italie. Enfin, aux plans matériels et humains, elle disposera d'atouts non négligeables : des navires de qualité, des personnels bien formés. Aidé par un plan social qui réduira les coûts et des personnels désireux de sauver l'emploi, son management ne manquera pas de tirer le meilleur de ce capital. Fort de ses compétences et disposant de capitaux, elle saura sans doute aussi apporter les corrections nécessaires. L'appel doffres portant sur le renouvellement de la Délégation de Service Public sera lancé en 2006. Nul doute que d'ici là et durant toute la consultation, la bataille sera rude entre un challenger qui espérait toucher au but et un champion désormais tiré de sa léthargie.
Pierre Corsi."

Ce dernier article est révélateur. Après la privatisation beaucoup attendaient le match entre 2 concurrents principaux, mais celui qui "touchait au but" préfère visiblement la concurrence ... sans concurrent.

BLOG CFE-CGC SNCM

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